Mère saturne
L’homme est autre dans la mesure où il cesse d’être lui-même, dans la mesure où il oublie d’être ce qu’il croit déjà être ou ce qu’il croyait être. L’homme est transition, mouvement, devenir. L’homme est une transmutation constante, l’homme est flux. De même, notre nom est la plus irréelle des choses que nous possédons. Ce dont nous avons besoin est d’un désapprentissage continu des récits, des approches et des classifications dont nous avons hérité, que nous ne remettons pas en question et avec lesquels nous affrontons le monde. Je vis sur les bords de ma langue, j’écoute le fleuve des voix de ma tradition, je m’enfonce dans le courant, je remonte les eaux, je vais là où naît la source, non pas pour me contempler mais pour te retrouver, parler avec toi, parler avec moi. Je vais à la recherche du nid de syllabes vers l’aube du langage, là je commence, là est ma fin, mon début, le nom exact de mon être dans ce monde.